Pour commencer, le plus simple est de vous parler de moi. De mon parcours pour commencer, et je poursuivrai ensuite sur mon poste actuel et tout son cortège d’hésitations, d’espoirs, de rages et d’émerveillements. Si vous êtes ici pour apprendre des trucs en préservation numérique pratique, vous allez devoir ronger votre frein encore un peu, veuillez m’en excuser.
Si je dois faire une socio-analyse en quelques lignes, je dirais que je suis issu du côté paternel d’une petite bourgeoisie de province éprouvée par la vie et du côté maternel d’un monde agricole digne et droit, dont les enfants ont eu la chance de se sortir. Cela fait de moi un semi-héritier relativement peu solide dans sa confiance en sa capacité à agir sur le monde. Affecté par une très forte myopie, j’ai appris assez tôt ce que signifiait l’exclusion. J’ai également développé un goût romantique pour le passé lorsqu’il peut éclairer notre présent, d’où mes passions adolescentes pour des auteurs comme Arturo Pérez-Reverte ou Umberto Eco. A la vocation de dénicheur de secrets historiques et d’enquêteur en matière occulte, la voie de l’archiviste paléographe offrait un plan B acceptable. J’ai donc fait, entre autres merveilleuses disciplines, de l’histoire médiévale et du latin pour intégrer l’École nationale des chartes.
Cette dernière m’a fait découvrir la paléographie et la diplomatique, entre autres sciences auxiliaires de l’histoire, qui ont eu au moins le mérite de m’inciter à plonger dans les sources primaires de l’histoire et à m’initier à l’archéologie des médias. En revanche, les cours d’informatique étaient ma bête noire : allergique au professeur, j’étais tout aussi réfractaire à l’apprentissage par cœur d’éléments d’histoire de l’informatique. Je voulais pratiquer, et je n’en ai absolument pas eu l’occasion alors. Pour couronner le tout, une install-party Linux organisée par des professeurs de l’ENC, laborieuse à l’extrême, s’est soldée par le ralentissement de mon ordinateur portable et m’a temporairement vacciné contre toute tentation geek.
Ce n’est que dans mon premier poste, au sein de ce qui était alors la Bibliothèque interuniversitaire de Montpellier, que le goût pour le numérique, et en particulier la programmation, m’est revenu. Le poste, essentiellement orienté vers la numérisation et la constitution d’une bibliothèque numérique, m’a donné l’occasion de me poser des questions assez pointues sur les formats de données, la manipulation de données textuelles structurées (je traduis ainsi ce qu’on a tendance à appeler « métadonnées »), la gestion de la couleur et, de manière générale, la préservation numérique dans sa plus simple expression, à savoir une gestion saine, durable et raisonnée de nos collections numérisées.
Je répugne également à parler de « technique » – la technique, c’est la tâche d’un·e autre – mais il est évident que j’étais attiré par ce que le numérique peut avoir de « magique ». Pour moi qui ne pouvais pas conduire du fait de ma vue basse, les outils numériques étaient un moyen d’apprendre, de faire, de calculer plus loin, comme la voiture démultipliait les capacités de déplacement. Lorsqu’on m’a annoncé qu’un poste se libérait à la BnF, poste qui s’annonçait monter de quelques crans dans le sens du développement de compétences numériques, je n’ai pas hésité très longtemps – aidé par la colossale force de conviction de mon futur chef !
La suite prévue de ce billet commence à mon arrivée à la BnF en novembre 2014 (oui, ça fait dix ans aujourd’hui que je suis arrivé à la BnF !).
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